mardi 31 août 2010

# 6 I don't want to fall asleep cause i'd miss a thing

On est le premier septembre depuis 5 minutes ici, depuis une heure et 5 minutes là bas, c'est une parfaite date pour commencer un blog, le 1er, n'est-ce pas ? Pour commencer une aventure, un journal de bord, ça aide à compter, à compter les jours depuis qu'on est là, à compter les jours avant de s'en aller.

Pour l'instant je ne compte pas, je laisse filer. Il y a une certaine sensation quand le mois de septembre arrive, de vide chez moi, pas de vide comme dans vacuité, coquille creuse, non, du vide comme dans un un gouffre, observé du haut d'une falaise. Cet inconnu qui est supposé devenir du connu au fil des années, une fois que l'ont est installé, ça devient une routine, Margaux ne fait rien comme les autres, Margaux passe les deux pires mois de son année en Juillet et en Août depuis six ans parce que rien ne se passe jamais comme prévu.



Été 2005 : je m'installe en Grèce pour entamer ma classe de 3ème.
Source de stress : euh déménager chez sa mère dans un pays étranger quand on a 13 ans et de sérieux problèmes de confiance en soi ?

Été 2006 : je passe des vacances dans la nouvelle maison de mon père à Montpellier et j'apprends que je n'ai plus de maison à Athènes.
Source de stress : déménagement non prévu, arrivée dans une nouvelle maison non prévue, inscription dans un nouveau lycée non prévu, comité d'accueil de ma belle famille non prévu

Eté 2007 : je passe en première, l'été se passe plutôt bien, j'ai eu ma dose de stress pendant l'année passée, exceptionnellement, spécialement en Juin quand on me menaçait tous les deux jours de me mettre en internat.
Été 2008 : Hop là ! Internat after all.
Source de stress : quitter mes amis, ma mère, mon frère, mon père, ma soeur (tout le monde habite pas ensemble, oouh, j'ai peur de donner l'impression d'une happy family là) pour me taper 7 heures de train quotidienne en direction de l'internat de Notre Dame de Mende, lycée privée catholique de la capitale administrative de la Lozère, une ville qui compte moins d'habitants que Paul Valery ne compte d'étudiants à Montpellier.

Eté 2009 : Lycée à peine terminé, bac à peine en poche, père et soeur à peine partis pour habiter à Tahiti pour quatre ans, me voilà dans mon premier appart toute seule.
Source de stress : pas voir mon père pendant quatre ans ? Sérieusement ? M'inscrire à la fac toute seule ? Trouver ma voie ? Bosser tout le mois de juillet avec des enfants ? Faire mes courses ? Ma lessive ? Mes papiers ? Et l'argent ? Et la CAF ? Comment on fait ? Et comment on fait quand on a encore besoin d'un bisou sur le front au moment d'aller dormir ?

Eté 2010 : 2010, où l'année où j'ai décidé que je prenais mes propres décisions.
Source de stress : et si ma première grosse décision tournait au fiasco ?


Je l'avoue, c'est ce que j'ai pensé la journée du 26 août, dans le train, Montpellier-Paris, à lire sur mon portable "It's gonna be fine now baby doll", à lever la tête et à voir mon frère mimer la scène de Kick Ass où Super Daddy tire sur Hit Girl. Quand je me suis fait limite engueuler par la douanière de la gare du Nord parce que je lui avais tendu un passeport maculé d'une goutte de transpiration (oui, désolée, moi quand je me tape une correspondance d'une demie heure entre deux gares parisiennes avec trois valises et deux sacs, un jour d'août, en oubliant d'enlever ma veste, je transpire, c'est la vie, c'est peut être dégueu mais deal with it).
C'est aussi ce que j'ai pensé quand je suis arrivée dans ma nouvelle ville en mode tempête de la mer du Nord, quand j'ai vu la taille de ma chambre, quand je me suis retrouvée seule face à mon lit, quand je me suis réveillée le premier matin, quand j'ai passé la première journée en ville, et que j'ai été forcée de constater que c'était pas Londres.

En regardant cette chronologie rapide de mes six derniers étés, je réalise que j'ai toujours du m'adapter à de nouveaux environnements à priori peu accueillants, j'ai survécu, je suis toujours là. J'ai peut-être mis pas mal de choses sur pause, ou en tout cas c'est l'impression que j'ai eu, j'ai peut être voulu beaucoup de choses que je n'ai pas eues, j'ai peut être eu envie de fuir cet endroit dans lequel j'ai vécu trois ans.

Il y a des personnes qui me manquent peut être, des que je suis heureuse d'avoir rencontrées, d'autres que je suis malheureuse de ne pas avoir pu rencontrer, justement.

Mais je ne suis plus triste, plus vraiment, je découvre, j'ai hâte de voir ce que cette année va faire de moi, en quoi elle tournera mon été 2011.


jeudi 5 août 2010

#5 You can see that life's for us to talk about

Tiens, j'ai une autre idée de première note pour cet endroit, je pourrais parler des Beatles, parce que ce soir, sur Arte, il y avait un documentaire sur les Beatles, sans aucune chanson (heureusement, sinon j'aurais pleuré) mais avec plein de bouts d'interviews, d'images d'aéroports et de bains de foules dans la rue.
C'est évident que je n'ai pas arrêté de me dire, pendant tout le long du documentaire, que l'histoire aurait été différente si John Lennon n'était pas mort, j'ai eu un petit coup de pression dans la poitrine quand j'ai bien constaté qu'on ne verrait jamais à quoi il aurait ressemblé à 60 ans, les autres choses qu'il aurait composées, les femmes qu'il aurait épousées, les déclarations qu'on lui aurait prêtées.

C'est toujours ça le problème, est-ce que les choses étaient destinées à se passer comme ça ? Est-ce que rien n'était écrit pour John Lennon après le 8 décembre 1980 ? Ou est-ce qu'on a juste manqué une des personnes les plus follement attachantes que le monde artistique ait compté ?

J'ai devant moi une pile de quatre cartons, remplis de livres, de magasines, et de disques, que j'ai emballés rapidement à la fin de l'après midi pour ne pas me laisser le temps de les regarder de trop près et de me demander si j'allais avoir envie de les lire, feuilleter, ou de les écouter une fois que je serai loin d'eux. Et alors que je regarde cette pyramide de souvenirs, je ne me demande pas si je fais bien de partir, je suis juste persuadée que j'aurais mal fait de rester.

Aujourd'hui, demain, et ce jusqu'au jour où je prendrai le train, et certainement quelques jours après mon arrivée dans ma nouvelle ville, je ne réussirai pas à me rappeler ce qui m'a poussé à faire tout ça, et à m'en aller, parce que je ne me rappellerai plus de cette année à ne rien faire de plus constructif que quelques commentaires de textes et contrôles de latin. Je ne me rappellerai plus le sol froid de ma chambre quand je me répandais en larmes et en complaintes adolescentes auprès de ma mère qui n'avait pas d'autre choix que de constater qu'effectivement, cette année a été une grosse blague.
Je ne me rappellerai peut être pas tout de suite à quel point j'ai toujours rêvé de l'Angleterre, qu'importe ce que je laissais derrière moi, c'était pas grave, parce que ce que je trouverais en arrivant serait mieux, parce que ça serait anglais. Mais c'était certainement parce que rien n'était sûr et que je me cachais derrière des textes et des photos d'un pays qui n'était encore qu'un lieu de musique, de films et de séjours épars.

Maintenant c'est vrai, c'est dans 21 jours, et je commence à faire le compte de ce que je laisse derrière moi. De ce qui aurait pu arriver, de ce qui arrivera.

Mais peut être que si il ne s'est rien passé pour moi cette année, c'est parce que rien n'était écrit pour moi, et que j'aurais du le comprendre, ne pas forcer le destin, ne pas m'inscrire bêtement à la fac l'été dernier, et me barrer là où j'ai toujours pensé que je devrais aller.